“Rien ne naît de rien, mais tout peut devenir unique.”
L’inspiration est au cœur de toute démarche créative, qu’elle soit artistique, spirituelle ou entrepreneuriale. Elle nous traverse, parfois sans prévenir, et nous pousse à écrire, peindre, enseigner, danser, ou simplement rêver un peu plus haut.
Mais dans un monde saturé d’images, de contenus et de “déjà-fait”, la frontière entre s’inspirer et copier devient parfois aussi fine qu’un souffle.
C’est ce fil que je t’invite à explorer dans l’épisode 82 de Tout est déjà là, intitulé : “Inspiration ou plagiat : où est la frontière ?”
Un épisode qui questionne notre rapport à la création, à nos maîtres, et à la pratique personnelle comme espace d’intégration.
Cet article en est le prolongement : une réflexion plus large sur la manière de faire de nos influences un terreau vivant, plutôt qu’un simple miroir des autres.
L’inspiration : un élan vital
L’étymologie du mot inspiration vient du latin inspirare, “souffler dans”. Inspiration, c’est le souffle qui entre — celui de la vie, de l’intuition, du mystère.
Chez les artistes, les yogis, les thérapeutes ou les entrepreneurs, c’est souvent ce moment de grâce où tout s’aligne, où l’on sent qu’une idée vient d’ailleurs. Mais l’inspiration n’est jamais totalement “pure”. Elle s’appuie sur nos lectures, nos rencontres, nos apprentissages, nos maîtres.
Les philosophes grecs disaient déjà que toute création est réminiscence — un souvenir qui se transforme.
Le risque, aujourd’hui, c’est la confusion entre inspiration et appropriation. À force d’être exposé aux œuvres, aux mots et aux mouvements des autres, on peut perdre la sensation de sa propre voix. Ce n’est pas une faute, mais un signal : celui qu’il est temps de revenir à sa pratique personnelle.
La pratique personnelle : le lieu où l’inspiration se transforme
C’est dans la pratique — qu’elle soit écriture, peinture, yoga ou méditation — que l’inspiration prend corps. Avant cela, elle n’est qu’une étincelle.
La pratique, c’est le creuset où les influences se fondent et deviennent vivantes. Peu importe la forme : un carnet de notes, un tapis de yoga, un pinceau, une marche silencieuse… C’est le moment où l’on cesse de recevoir pour digérer. Où l’on se confronte à la matière, à soi, à l’imperfection.
Virginia Woolf écrivait que “créer, c’est oser écouter sa propre voix jusqu’au bout du silence”.
C’est exactement cela : l’inspiration se transforme quand on lui laisse le temps de descendre du mental vers le vécu. Elle s’incarne.
C’est aussi ce que j’explore dans le podcast : comment passer de l’admiration à l’intégration, du modèle à la matière personnelle. Parce qu’il ne suffit pas d’apprendre, encore faut-il laisser ce que l’on apprend devenir vrai pour soi.
Copier n’est pas créer : le danger du mimétisme
L’histoire de l’art et du yoga regorge d’exemples où la limite a été franchie. Parfois sans malveillance, simplement parce que le geste d’un autre s’est imprimé trop fort.
Les Beatles eux-mêmes ont reconnu avoir été “traversés” par les sons qu’ils écoutaient, jusqu’à en perdre la frontière.
Les neurosciences parlent de mimétisme comme d’un réflexe d’apprentissage humain. Nous apprenons en imitant, c’est vrai. Mais grandir, c’est ensuite s’en détacher.
C’est ce que le psychologue Albert Bandura appelait le passage du “modèle observé” à la “création autonome”. Dans nos métiers — qu’on soit guide de yoga, artiste, écrivain ou thérapeute — le mimétisme peut devenir une forme de protection. On se cache derrière un cadre, une posture, un style. Mais à long terme, cela étouffe la voix singulière que l’on est censé révéler.
Et toi, quand tu pratiques ou enseignes, cherches-tu à partager ou à prouver ?
Citer ses sources, c’est un acte d’humilité et de puissance
Reconnaître ce qui nous inspire n’enlève rien à notre lumière. Au contraire : cela nous relie.
Citer un enseignant, une lecture, un maître, c’est honorer la chaîne de transmission dont nous faisons partie. C’est aussi une forme d’éthique — une cohérence entre ce que nous enseignons et la manière dont nous le faisons.
Dans le yoga, cela fait écho à satya (la vérité) et à ahimsa (la non-nuisance).
Dans la création, c’est une posture d’humilité : reconnaître que l’on s’inscrit dans un fleuve plus large que soi.
Et puis, soyons honnêtes : nos élèves, nos lecteurs, nos clients ne cherchent pas l’originalité absolue.
Ils cherchent une voix juste, une présence vraie.
Et cela, personne d’autre ne peut le reproduire.
Créer à partir de soi : retrouver la confiance dans sa singularité
Créer depuis soi ne veut pas dire “réinventer la roue”. Cela veut dire laisser passer à travers soi ce que l’on a intégré.
Le peintre Paul Klee disait : “L’art ne reproduit pas le visible, il rend visible.”
C’est une phrase qui résume parfaitement l’esprit de la pratique personnelle : elle ne cherche pas à refaire ce qui existe, mais à révéler ce qui vit à l’intérieur.
C’est la même chose sur le tapis de yoga, dans un texte, ou dans un atelier de création : plus on pratique, plus ce que l’on transmet devient poreux, incarné, habité.
C’est cette qualité de présence — plus que la nouveauté — qui rend une œuvre ou une transmission authentique.
Dans l’épisode du podcast, je partage plusieurs pistes pour t’aider à cultiver cette autonomie créative et énergétique : comment ne pas perdre ta voix au milieu du bruit, comment honorer tes sources tout en affirmant ta couleur. Tu y trouveras aussi des questions d’introspection pour t’aider à faire le tri entre influence et alignement.
Et si la vraie inspiration venait du silence ?
La vraie inspiration ne vient pas des réseaux, ni des tendances. Elle naît dans les espaces de vide : la marche, la respiration, la contemplation, la pratique silencieuse. C’est là que les idées se décantent et deviennent claires.
David Lynch, dans Attraper le grand poisson, dit que “les idées sont comme des poissons : plus on plonge profondément, plus elles sont grandes et lumineuses”.
Et pour plonger, il faut du calme. Pas du vacarme. La pratique personnelle, quelle qu’en soit la forme, est ce lieu de plongée. Un espace de lenteur, de présence, d’écoute. C’est le seul endroit où l’on peut transformer les influences du monde en matière vivante.
Pour aller plus loin
Dans le dernier épisode du podcast Tout est déjà là, j’explore la frontière entre inspiration et plagiat sous un autre angle : celui du passage de la transmission à l’incarnation. Comment faire de ce que l’on reçoit un outil d’évolution, et non de comparaison ?
Comment revenir à une éthique du partage qui soit source de liberté, pas de contrainte ? Si cet article t’a parlé, l’épisode te donnera des clés supplémentaires pour t’y retrouver dans cette zone subtile où se rencontrent création, pratique et intégrité.
Parce qu’au fond, la plus belle œuvre, c’est celle qui naît de l’intérieur. Et la seule voix que personne ne peut copier…C’est la tienne.





